« L’artiste n’est pas nécessairement l’individu qui doit sécuriser et flatter le bon goût. Notre société est suffisamment capable de produire de beaux projets sans que l’art ait à le faire. Croire en l’art, c’est estimer qu’on puisse penser à autre chose ; que le souhaité et le souhaitable ne sont pas dans la réalisation d’un objet visant la sécurisation.
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La beauté n’est plus qu’une extension du corps renouvelé par une stimulante projection dans l’imaginaire. A la limite, le rouge et le sol bémol produisent peut-être le même résultat lorsque perçus.Une peinture n’a alors de statut artistique qu’institutionnel et son "effet" peut très bien être rendu par une simple phrase ou un espace architecturalement délectable. Mais, pour en prendre conscience, il nous faut détourner les objectifs hégémoniques des valeurs perceptuelles : qu’est-ce qui a préséance comme objet d’art sur la vie ? La vie elle-même devient objet d’art lorsque chaque minute consciemment vécue se transforme en énergie. »
Richard MARTEL, "Vu du corps, il n’y a d’art qu’actuel" in Intervention, n° 10-11, 1981, in Art-Action, recueil de textes de Richard Martel, édition Les presses du réel, 2005, p. 167.