RESUME : Une exposition aux intentions pédagogiques sur la Propriété Intellectuelle, décrit toutes les formes de contrefaçon mais censure les informations se rapportant aux pratiques licites du Libre et de l’Open-Source. Si on avait voulu faire l’apologie des pratiques illicites on ne s’y serait pas mieux pris !
Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, j’ai la fausse joie de vous annoncer l’ouverture d’une exposition aux prétentions pédagogiques sur la Propriété Intellectuelle dont le seul volet consacré à la présentation du Libre, un texte concis enregistré par votre serviteur, a été censuré à la demande de l’INPI, principal partenaire de l’exposition.
« CONTREFAÇON, la vraie expo qui parle du faux » commence le 20 avril à la Cité des Sciences et de l’Industrie de la Villette et court jusqu’en février 2011 [1]. Comme son sous titre accrocheur l’indique, vous y verrez fausse monnaie, fausses marques, faux médicaments, fausses montres,... et dans la foulée, le faux nez de la vraie musique téléchargée illégalement par quelques adolescents dont on se propose de corriger l’égarement à coup de questionnaires faussement ludiques et de sorties scolaires faussement récréatives [2]. Copier c’est mal, voilà tout le message de ce déballage qui décrit les multiples formes de la contrefaçon avec la verve qu’en d’autres temps, des enlumineurs auraient employée pour dépeindre les sept péchés capitaux en motifs grotesques.
Hélas, à côté de ce tableau des pratiques illicites, il ne faut pas s’attendre à trouver beaucoup de nuances dans la définition de ce qui est au contraire licite en matière de propriété intellectuelle. En effet, le domaine du Libre est totalement exclu du corpus de l’exposition. Et quand je dis exclu, il ne s’agit pas d’omission ou d’ignorance, mais bien de censure.
Initialement, les commissaires de l’exposition avaient prévu de consacrer un modeste volet à la présentation du Libre ; cela leur paraissait incontournable et c’est bien la moindre des choses. Dans cette optique, j’avais été contactée en septembre 2009 par une des commissaires adjointes qui me demandait de rédiger un texte concis définissant le Libre, ses enjeux et ses perspectives. Le texte devait être diffusé dans une petite zone de l’exposition équipée de bornes audio avec la version écrite affichée à proximité.
Mais le 16 avril 2010, quatre jours avant l’ouverture de l’exposition, j’ai reçu un mail de la commissaire en chef m’informant que mon texte ne pourra pas être diffusé : « notre partenaire principal, l’INPI, est farouchement opposé à ce que l’exposition donne la parole aux défenseurs du "libre". Nous avons essayé de discuter et d’argumenter avec eux mais l’INPI reste intransigeant sur sa position. Nous sommes donc obligés, avec grand regret, de ne pas présenter votre parole que vous aviez, aimablement, accepté de rédiger et d’enregistrer. ». Quelques minutes plus tard, je recevais un mail d’excuses de la commissaire adjointe, sincèrement désolée. En pièce jointe, elle me restituait mon texte, enrichi des traductions réalisées par son équipe. Je l’en remercie, car ces traductions sont bien le seul avantage que j’aurai tiré de cette affaire.
Qu’un établissement public cède aux desiderata de ses partenaires financiers et renonce à sa liberté de parole est en soi scandaleux [3]. Mais prétendre informer le public sur la question de la Propriété Intellectuelle sans jamais évoquer le modèle du Libre, pourtant en plein développement, est tout simplement malhonnête et relève d’une entreprise de désinformation. Comment peut-on faire semblant de ne pas voir la montagne Wikipedia et l’Himalaya des logiciels libres qui font désormais partie de notre environnement de travail quotidien parmi tant d’autres bourgeons du Libre ? Ne sont-ils pas des exemples éclatants de la réussite d’un régime de propriété intellectuelle qui garantit la liberté de copier, de modifier et de diffuser des œuvres selon un cadre contractuel parfaitement légal ?
Pour moi, ce petit texte est un élément de vulgarisation parmi d’autres et je n’en aurais sans doute pas fait état sans cet acte de censure. Il est d’ailleurs fort probable qu’il serait passé quasiment inaperçu si les choses s’étaient passées comme prévu par les commissaires de l’exposition : qui donc, au détour du fastidieux parcours énumérant les cas de contrefaçon dûment constatés, chiffrés et illustrés, aurait encore le courage de se planter devant une borne audio pour entendre une autre voix ? L’intransigeance de l’INPI qui prive les commissaires de la satisfaction, même illusoire, d’avoir honnêtement couvert le sujet en réservant une portion congrue à la présentation du Libre, est tout à fait étonnant. Pourquoi l’INPI a pris le risque de se ridiculiser en censurant un texte promis aux oubliettes ? Il faut croire que cette voix, aussi discrète soit-elle, dérange encore trop. Elle dérange parce qu’elle n’appartient pas au monde binaire que tentent de nous décrire les lobbys des ayant droit. Cette voix parle à la grande catégorie des amateurs et bricoleurs qui ne se reconnaissent ni dans la figure du faussaire ni dans le masque de l’Auteur floué derrière lequel se cachent les ayant droit [4]. Pour le coup, ce texte que je trouvais quelque peu effacé à cause de l’exercice de concision auquel j’étais astreinte, prend de l’importance. Aussi, je le publie ci-après, et vous invite à copier, diffuser, commenter ou augmenter tout ou partie de cet article en faisant bon usage des dispositions de la Licence Art Libre :
Dans le cadre du droit d’auteur qui protège les créations littéraires et artistiques, un nombre croissant d’auteurs choisissent de mettre leurs œuvres à la disposition du public avec un type de contrats bien spécifiques qu’on appelle des licences libres. Ces licences autorisent quiconque à diffuser des copies de l’œuvre. Elles l’autorisent également à publier sous sa propre responsabilité d’auteur des versions modifiées de l’œuvre. Ces autorisations sont assorties de deux conditions :
Premièrement, il faut mentionner l’auteur de l’œuvre initiale et donner accès à ses sources
Deuxièmement, les copies ou versions modifiées de l’œuvre doivent être publiées avec les mêmes autorisations.Les œuvres libres sont nécessairement divulguées avec une licence qui garantit ces conditions. Parmi ces licences, on peut citer la GNU GPL, pour les logiciels, et la Licence Art Libre, pour les œuvres culturelles. Le domaine des œuvres libres n’est donc ni une zone de non droit ni assimilable au gratuit. D’ailleurs les anglo-saxons associent le mot français « libre » au mot « free » pour écarter toute confusion, car il y a des œuvres gratuites qui ne sont pas du tout libres, et il y a des œuvres libres payantes.
On parle aussi du « monde du libre » pour désigner l’ensemble des acteurs qui participent à la promotion et au développement du domaine du libre. Ce mouvement s’inspire des usages qui régissent la circulation des connaissances dans les milieux académiques. Mais depuis 1983, ce sont les développeurs de logiciels qui sont à l’avant-garde de ce mouvement et de sa formalisation juridique, car dans ce secteur d’activité la nécessité d’innovation est constante et les utilisateurs ont tout intérêt à mettre la main à l’ouvrage pour améliorer les défauts d’un logiciel ou l’adapter à leurs besoins. Ainsi, ils deviennent à leur tour auteurs.
Ce modèle de développement correspond aux aspirations d’une société démocratique composée de citoyens qui apportent une contribution constructive à la vie publique et ne se contentent pas d’être seulement gouvernés. L’intérêt que suscite le Libre est donc d’abord d’ordre politique. Cet intérêt est exacerbé par le fait que les législations de plus en plus restrictives sur le droit d’auteur évoluent à contresens de l’intérêt du public et deviennent des freins pour la création. Dans ce contexte, les licences libres apparaissent comme une issue légale et pragmatique pour constituer un domaine dans lequel les obstacles à la diffusion et à la réutilisation créative des œuvres sont levés.
Dans le domaine de la création artistique et de la publication scientifique, le modèle du libre correspond aussi à une réalité sociale. C’est l’émergence d’une société d’amateurs qui, à la faveur d’un meilleur accès à l’éducation, au temps libre, aux moyens de production et de communication, s’invitent sur la scène en bousculant parfois les positions établies. Ces amateurs sont les vecteurs, les acteurs et les transformateurs de la culture, ils en sont le corps vivant ; sans eux les œuvres resteraient « lettre morte ».
Depuis le 19ème siècle, avec la création des musées et la naissance du droit d’auteur, notre culture a privilégié les moyens de la conservation pour assurer la pérennité des œuvres. Aujourd’hui, les supports numériques et internet sont en train de devenir les principaux moyens de diffusion des œuvres. Certes, internet est un puissant moyen de communication, mais il n’a pas encore fait ses preuves en tant que moyen de conservation. Ce qui se profile avec le modèle du libre, c’est que parallèlement aux efforts de conservation dont le principe n’est pas remis en cause, une autre forme de pérennisation retrouve sa place dans notre culture ; il s’agit de la transmission, qui fonde aussi la tradition. Or, l’acte de transmission passe par un processus d’appropriation (on ne peut transmettre que ce qu’on a déjà acquis ou assimilé), et cela implique des transformations qui font évoluer les œuvres. C’est la condition d’une culture vivante, une culture portée par des acteurs plutôt que supportée par des sujets.
En el ámbito del derecho de autor que protege las creaciones literarias y artísticas, cada vez más autores optan por poner sus obras a disposición del público con un tipo de contratos muy específicos que se denominan licencias libres. Estas licencias autorizan a cualquiera a difundir copias de la obra. También le autorizan a publicar versiones modificadas de la obra bajo su propia responsabilidad de autor. Estas autorizaciones están sujetas a dos condiciones :
En primer lugar, es preciso mencionar el autor de la obra inicial y dar acceso a sus fuentes.
En segundo lugar, las copias o versiones modificadas de la obra deben publicarse con las mismas autorizaciones.Las obras libres tienen que divulgarse obligatoriamente con una licencia que garantiza estas condiciones. Entre estas licencias, se pueden citar la Licencia Pública General de GNU (GNU GPL por sus siglas en inglés), para los programas y la Licencia Arte Libre para las obras culturales. Por lo tanto, el ámbito de las obras libres no constituye un área sin legislar ni se asemeja a la gratuidad. Por otra parte, los anglosajones asocian la palabra francesa « libre » a la palabra « free » para descartar cualquier confusión, puesto que existen obras gratuitas que no son en absoluto libres y también existen obras libres que son de pago.
También se habla del « mundo de lo libre » para designar al conjunto de actores que participan en la promoción y en el desarrollo del campo de lo libre. Este movimiento se inspira en los usos que rigen la transmisión de los conocimientos en los medios académicos. Pero desde 1983, son los programadores los que están a la vanguardia de este movimiento y de su formalización jurídica, puesto que en este sector de actividad la necesidad de innovación es constante y los usuarios tienen gran interés en actuar para mejorar los fallos de un programa o para adaptarlo a sus necesidades. De este modo, se convierten a su vez en autores.
Este modelo de desarrollo corresponde a las aspiraciones de una sociedad democrática compuesta por ciudadanos que aportan una contribución constructiva a la vida pública y no se contentan solamente con ser gobernados. El interés que suscita la licencia Libre es en primer lugar de orden político. Este interés se intensifica por el hecho de que las legislaciones cada vez más restrictivas sobre los derechos de autor evolucionan en contra de los intereses del público y se convierten en un freno para la creación. En este contexto, las licencias libres surgen como una salida legal y pragmática para constituir un campo en el que se eliminan los obstáculos a la difusión y a la reutilización creativa de las obras.
En el ámbito de la creación artística y de la publicación científica, el modelo de obra libre corresponde también a una realidad social que es la emergencia de una sociedad de entusiastas de la cultura que, estando a favor de un mejor acceso a la educación, al tiempo libre, a los medios de producción y de comunicación, entran en escena cambiando a veces totalmente las posturas establecidas. Estos entusiastas son los vectores, los actores y los transformadores de la cultura ; son el cuerpo vivo y, sin ellos, las obras serían « letra muerta ».
Desde el siglo XIX, con la creación de los museos y el nacimiento del derecho de autor, nuestra cultura favoreció los medios de conservación para garantizar la perennidad de las obras. Actualmente, los soportes digitales e Internet se están convirtiendo en los principales medios de difusión de las obras. Sin duda alguna, Internet es un potente medio de comunicación, pero todavía no ha demostrado ser un medio de conservación. Lo que se perfila con el modelo de obra libre es que, junto con los esfuerzos de conservación cuyo principio no se cuestiona, otra forma de perpetuación encuentra su lugar en nuestra cultura ; se trata de la transmisión, que fundamenta también la tradición. Pero el acto de transmisión pasa por un proceso de apropiación (sólo se puede transmitir lo que ya se ha adquirido o asimilado) y esto implica transformaciones que hacen evolucionar las obras. Esta es la condición para una cultura viva, una cultura sustentada por actores más bien que soportada por sujetos.
Within the framework of the author’s copyright that protects literary and artistic works, a growing number of authors choose to make their works available to the public with contracts of a very specific type called free licences. These licences allow anyone to distribute or perform copies of the work. They also permit the release, under their own author’s responsibility, of modified versions of the work. These permissions are granted on two conditions :
Firstly, mention must be made of the author of the original work and specify where to access the originals
Secondly, copies or modified versions of the work must be distributed or performed under the same or a compatible licence.Free works are necessarily disclosed with a licence which guarantees these conditions. Examples of such licences include the GNU GPL for software, and the Free Art Licence for creative works. So the area of free works is not an area in which there are no rights, nor is it the same as royalty-free. [Indeed, English-speaking countries tend to combine the French word ’libre’ with the word ’free’ to avoid confusion, because some works are free of charge but subject to copyright restrictions, while others are ’free-libre’ but not free of charge] [5].
People also talk about the “free world” to refer to all those involved in the promotion and development of the free area. This movement is inspired by customary practices governing the circulation of knowledge in the academic world. But since 1983, software developers have been in the forefront of this movement and its legal formalisation, because in this business sector there is a constant need for innovation and users have every interest in getting hold of the work to rectify defects in software or adapt it to their own requirements. So they in turn become authors.
This development model reflects the aspirations of a democratic society of citizens who make a constructive contribution to public life and are not content to simply be governed. So the interest taken in Free is first political. This interest is heightened by the fact that increasingly restrictive legislation on author’s rights is moving against the public interest and is becoming a constraint on creative activity. Against this background, free licences seem to be a legal and pragmatic solution to establish an area in which obstacles to the distribution and creative use of original works are lifted.
In the area of artistic creation and scientific publication the free model also reflects a social reality. This is the emergence of a society of amateurs who, thanks to better access to education, leisure time, the means of production and communication, have worked their way on to the scene sometimes shaking up established positions. These amateurs are the vectors, activists and transformers of the culture, they are its living body ; without them works would remain unread, unused and unperformed.
Since the 19th century, with the creation of museums and the birth of author’s rights, our culture has favoured conservation as the means of ensuring the lasting survival of works. Today, the digital media and the internet are becoming the principal means of distributing works. Certainly the internet is a powerful means of communication, but it has not yet proved itself as a means of conservation. What is taking shape with the free model is that in parallel with conservation efforts, the principle of which is not in question, is a different form of ensuring lasting survival is finding its place in our culture ; this is transmission, which is also the basis of tradition. Yet the act of transmission takes place through a process of appropriation (you can only pass on what you have already acquired or absorbed), and this implies transformations that make works evolve. This is a condition of a living culture, a culture carried by actively involved people rather than supported by subjects.
Copyleft : Isabelle Vodjdani, 20 avril 2010, ce texte est libre, vous pouvez le copier, le diffuser et le modifier selon les termes de la Licence Art Libre http://www.artlibre.org
[1] « CONTREFAÇON, la vraie expo qui parle du faux », Cité des Sciences et de l’Industrie, Parc de la Villette, Paris, du 20 avril 2010 au 13 février 2011
[2] Depuis plusieurs années des études sur l’impact du piratage sur le marché de la musique apportent régulièrement un démenti aux affirmations des lobbys de la répression du téléchargement. Dans la dernière en date, Le GAO affirme que les chiffres du piratage sont contrefaits (ReadWriteWeb, 19 avril 2010)
[3] Précisons que L’INPI est également un établissement public, mais autofinancé et relevant de la tutelle du ministère de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi, tandis que la Cité des Sciences et de l’Industrie est sous la tutelle du ministère de la Culture.
[4] Comme on le sait, la figure de l’auteur floué par les petits "pirates" est le masque dont se parent les ayants doits qui, pour rester dans l’ordre des métaphores de la marine, se comportent en véritables "requins". Pour ne citer qu’un seul exemple, voir l’article du Point en date du 10 avril 2010 : Comment la Sacem se goinfre....
[5] Suite aux remarques avisées des lecteurs en commentaire de cet aricle, et en concertation avec les services de traduction de la Cité des Sciences (AlphaCRC) nous avons corrigé ce passage. La traduction initiale était : « English-speaking countries use the word “free” for the original French “libre” to avoid confusion, because there are royalty-free works that are not at all free, and there are free works on which royalties are payable. »
Personnellement, je ne m’étonne pas de voir la Cité des Sciences jouer le rôle du gendarme de l’INPI dans cette affaire.
Il faut se souvenir que dans le milieu des années 1990, alors que l’Internet était en pleine expansion et qu’on appercevait déja le tsunami du Web à l’horizon, les gestionnaires et les techniciens de cette institution promouvaient, à grand renfort de deniers publics dispensés sans compter aux industriels, une solution technique pour leur réseau interne fondée sur ATM dans la meilleure tradition monopolistique des opérateurs de téléphonie qui vérouillaient le marché depuis un petit siècle.
La Cité des Sciences et de l’Industrie fait encore partie de ces citadelles où la méritocratie française, issue des filières les plus sélectives de notre système d’enseignement supérieur, vérouille l’innovation au profit à court terme des intérêts industriels les plus sordides,et long terme des concurrents étrangers qui ne souffrent pas de ces scléroses institutionnelles.
Autrefois, les mécènes encourageaient et subventionnaient les lettres, les arts et les sciences pour le simple amour de ces derniers.
Aujourd’hui, le mécénat d’entreprise, appelé aussi partenariat ou sponsoring apporte un soutien financier aux entreprises culturelles, aux artistes et aux sportifs en l’échange d’une visibilité de leur marque et parce que de telles actions leur procurent des avantages fiscaux.
La Cité des sciences, établissement public à caractère industriel et commercial a pour obligation de générer une part de ressources propres. Cela l’amène à faire appel à des entreprises partenaires pour financer en partie ses expositions.
Si certains partenaires se contentent d’apporter de l’argent en l’échange d’une présence bien visible de leur logo, d’autres, exigent de lire et de valider l’ensemble des contenus. Cela n’est autre que de la censure, bien souvent décriée par les commissiares d’expo mais parfaitement intégrée par une direction soumise aux pressions financières.
Comme le dit justement Isabelle Vodjani, la censure demandée par l’INPI et acceptée par la Cité des sciences est au coeur de la problématique du savoir et de la culture transformés en marchés contrôlés par des sociétés commerciales, des lobbies, des ayant-droits pour qui seuls comptent l’argent et la rentabilité.
Dans quelques semaines, l’expostion permanente Energie ouvrira ses portes à la Cité des sciences. Les partenaires de l’expo étant Total et Areva, il est fort à parier que le discours qu’on nous tiendra sur le développement durable et l’énergie nucléaire auront été édulcorés à souhait !
Merci les sponsors !
S’il est dommage que logiciel libre n’ai pas été inclue dans cette exposition, il est aussi dommage que votre définition du libre soit incorrect, en effet nombre logiciel libre autorise la redistribution de leur travail avec une licence différente. C’est en particulier le cas d’un des concourants de linux (BSD), mais aussi du projet xorg qui s’occupe de l’affichage de nos cher fenêtre dans la très grande majorité des distributions de nos jours.
Reprendre un résumé de la DFSG aurait été une meilleur définition.
Merci pour votre commentaire. C’est exact ; certaines licences libres autorisent la redistribution de versions modifiées de l’œuvre sous d’autres licences, y compris des licences incluant des clauses d’exclusivité (dites propriétaires). Même s’ils ne les recommandent pas, Debian ou GNU s’en arrangent puisque les versions modifiées des oeuvres placées sous de telles licences peuvent tout aussi bien être redistribuées sous des licences libres au plein sens du terme, c’est à dire des licences comportant également la clause Copyleft, clause qui assure la perpétuation des mêmes libertés pour de nouvelles versions modifiées de l’œuvre.
Cependant, comme vous avez pu le noter, pour ce texte de vulgarisation très généraliste qui ne se cantonne d’ailleurs pas aux seuls logiciels, j’étais tenue à une grande concision. J’ai donc choisi de privilégier une définition sans chicanes qui reflète pleinement la philosophie du Libre.
Entrer dans le détail des distinctions entre les licences libre-copyleft, libre-light ou semi-libre aurait débordé les limites et les objectifs de ce petit texte. En ce qui concerne les oeuvres non-logicielles, vous trouverez sur transactiv.exe un article qui tente un comparatif raisonné de quelques licences libres non logicielles : Comparatif de licences libres, le choix du libre dans le supermarché du libre choix.
Vous avez tout le soutien de notre modeste structure oeuvrant dans le libre (Netlabel) et nous partageons votre indignation envers cette volonté farouche de dissimuler au grand public l’existence d’alternatives légales au "marché" de la propriété intellectuelle.
Dans le domaine de la musique, comme dans celui du logiciel, la masse sans cesse grandissante des créations sous licence de libre diffusion devrait naturellement ammener les pouvoirs publics à se réjouir de l’existence d’un biais de diffusion de la culture avec un tel potentiel (accessible à tous sans condition de ressources, ouvert, légal, pédagogique...)
Malheureusement il n’en est rien, et cette conivence avec les poids lourds du secteur marchand est en tout point honteuse.
Quoi qu’il en soit, nous sommes persuadés que la reconnaissance du libre est inévitable, fut-ce "de fait". Tout faire pour la retarder n’est rien d’autre qu’une preuve d’ignorance et d’égoisme.
Cordialement,
LCL netlabel
www.lclweb.org
Bravo pour le texte très clair et relativement complet malgré l’impératif de concision. Néanmoins, j’ai pu remarquer que la fin du deuxième paragraphe dans la version en langue anglaise n’était pas aussi claire qu’en français et en espagnol :
English-speaking countries use the word “free” for the original French “libre” to avoid confusion, because there are royalty-free works that are not at all free, and there are free works on which royalties are payable.
Certes, on comprend tout de même de quoi il s’agit, mais j’imagine que pour les personnes qui ne connaissent absolument pas, il leur faille réfléchir un petit peu pour démêler quel free correspond à freedom, et quel free correspond à free beer.
L’usage du terme “libre” en langue anglaise dans ce contexte étant défini en début de phrase, je propose la modification suivante :
English-speaking countries also use the word “libre”, which is French for “free”, to avoid confusion, because there are royalty-free works that are not at all “libre”, and there are “libre” works on which royalties are payable.
À noter que j’ai fait la modification assez rapidement. Il y a sans doute moyen de faire mieux.
Merci beaucoup pour votre proposition (merci également à @cosmocat et @LCG qui avaient signalé ce problème de traduction). J’intègre la correction avec encore quelques modifications :
English-speaking countries often join the french word ’libre’ with ’free’ (as freedom) in order to avoid confusion, because there are royalty-free works that are not “libre-free” at all, and there are “libre-free” works which are for a fee.
Pour autant que je puisse en juger, le passage en question ne semble pas poser de problème en espagnol.
Je remercie les services de traduction de la Cité des Sciences (en l’occurrence la société Alpha CRC) qui ont vraisemblablement suivi les discussion de ce forum et ont poussé la conscience professionnelle jusqu’à m’écrire pour proposer une meilleure traduction de ce petit passage assez retors concernant la confusion des mots "gratuit" et "libre" en anglais. J’ai donc encore une fois modifié la traduction anglaise dans le texte selon leur suggestion :
« Indeed, English-speaking countries tend to combine the French word "libre" with the word "free" to avoid confusion, because some works are free of charge but subject to copyright restrictions, while others are "free-libre" but not free of charge. »
Comme promis voici la réponse qui m’a été envoyé par l’INPI :
"A l’occasion de l’ouverture, le 20 avril, de l’exposition « Contrefaçon : la vraie expo
qui parle du faux » à la Cité des sciences et de l’industrie, l’INPI et la Cité sont
accusés par certains blogs de « censurer » le logiciel libre.
Cette information émane de Mme Isabelle Vodjdani qui a été sollicitée par les
équipes de la Cité pour proposer un texte sur le logiciel libre.
A quelques jours de l’ouverture de l’exposition, le comité de pilotage de l’exposition
a décidé collégialement que ce texte, qui prend la forme d’un sonore, ne figurerait
pas dans l’exposition. Nous avons finalement choisi de ne pas aborder le thème du
logiciel libre dans cette exposition sur la contrefaçon afin d’éviter toute confusion et
mélange des genres entre libre et contrefaçon, pour un public non-initié. Il ne s’agit
donc en aucun cas d’une censure mais d’un souci légitime de clarté.
De manière générale, le logiciel libre trouve sa place aussi bien à l’INPI, qu’à la Cité.
Pour preuve, l’INPI l’utilise largement pour ses besoins propres : il a notamment
choisi le logiciel libre Typo3 pour la gestion des contenus de ses sites Internet et
Intranet, OCS-Inventory et GLPI pour la gestion de son parc informatique, et Nagios
pour la supervision informatique.
De son côté, la Cité a été précurseur dans la démonstration, les ateliers, les
conférences et l’installation de logiciels libres et, plus globalement, soutient le libre,
tout au long de l’année, au sein de son Carrefour numérique, ouvert à tous publics,
en accès libre et gratuit.
Dans le cadre de l’expo « Contrefaçon », le Carrefour numérique organise ainsi des
démos sur la contrefaçon numérique : Comment protéger ses créations
numériques ? Les oeuvres (création, logiciels). Qu’est ce que la propriété
intellectuelle et droit de la création ? Comment les oeuvres sont-elles analysées par un
ordinateur ? Comment sont-elles numériquement "protégées" ? où il est
évidemment question des logiciels libres.
De plus, les 29 et 30 mai prochains, le Carrefour numérique organise une Ubuntu
Party, à laquelle participent de nombreux acteurs du libre.
Et en plus, c’est gratuit !"
Je suis doctorant en informatique et comme je m’intéresse beaucoup à ces questions j’ai suivi le module "Propriété Intellectuelle" de mon école doctorale. Il y avait des intervenants de l’INPI, de la CCI locale et du pôle juridique de mon université. Or j’ai été extrêmement choqué par les aspirations très matérialistes de tous ces gens et leur vision plus qu’à ras des pâquerettes du rôle de la recherche dans la société. En un mot ils rêvent que chaque chercheur "privatise" son domaine de compétence et "capitalise" ses connaissances pour s’adonner aux joies du capital. Toute dimension altruiste était ignorée et toute dimension spirituelle reniée !
Peut-être que ces ressorts sont individuellement excusables, qu’ils ne sont que le reflet d’inquiétudes bien présentes et de fatalités plus ou moins réelles ("La concurrence mondiale nous oblige à innover !", "L’université ne pourra pas financer tous les laboratoires l’an prochain...", "Le MIT l’a fait alors nous aussi nous devons le faire !", "La région doit créer tant d’emplois dans les NTIC l’an prochain.", etc...) mais tout cela me semble complètement malsain et le signe d’un repli identitaire économique dépassé.
Or Internet, le "libre", Wikipedia et la vision "politique" qui s’en dégage me semble bel et le véritable moyen d’apporter une solution à cette crise de la prédation globale. Cela dérange car cela nous interpelle tous. Pourtant quand je demandais ce qu’inspirait le modèle du "libre" à l’intervenant de l’INPI (j’essayais d’ouvrir le débat) j’ai déchanté. La personne que j’avais en face n’essayait même pas de voir les limites de ce "tout brevetable", salut d’entre les saluts de ce "tout économique"...
C’est la preuve d’une grande ignorance quant aux motivations des hommes et des femmes qui ont fait émerger les sciences et je ne parle même pas des enjeux démocratiques, environnementaux de notre époque. Pourtant il y a plus à gagner d’une humanité altruiste qui oeuvre librement pour le plus grand bien de tous que d’une humanité esclave de ses besoins qui court après un argent rare rendu inégal. La voie qu’a ouvert le "libre" apporte bel et bien un début de réponse et le XXIème siècle ne saurait se priver de ce paradigme s’il aspire à plus de raison. En comparaison la lutte contre la contrefaçon semble bien pâle pour répondre à l’enjeu d’une société mondiale plus juste.
Bonjour,
Je voulais simplement exprimer ma complète adhésion sur votre excellente analyse. Je crois que nous devons faire en sorte, chacun à sa manière que le "libre" (entre autre) puisse continuer d’exister, de progresser et de s’améliorer. C’est pour moi une évidence.
Très cordialement
La Cité des sciences, dans sa tentative actuelle de dévorer le Palais de la Découverte, c’est quand même le triomphe de la vulgarisation commerciale de la Science (au travers de projections de films 3D américains...) sur l’Education à la Science qui a (encore) lieu au Palais...
Cela ne m’étonne donc pas que les tenants de la "merchandisation" soient, disons d’accord, avec ceux qui vous sont "farouchement opposés".
Peut-être même, si je peux me permettre, auriez-vous pu réfléchir à la chose avant d’envisager de, disons le mot, collaborer avec eux ?
Ma suggestion : adressez-vous au Palais la prochaine fois -s’ils vivent encore : c’est urgent !