La capacité des foules à coordonner des actions ou manifestations via les téléphones portables et internet a été d’abord stigmatisée par H. Rheingold dans son récent ouvrage Smart mobs. Depuis, nous assistons à un engouement ludique pour les flashmob, rassemblements éclair de centaines de personnes qui ne se connaissent pas, mais obéissent à une série d’instructions anonymes successivement transmises par internet, téléphones portables et flyers. Initiée par cheesebikini à New York en juin dernier, cette pratique bon enfant mais assez controversée, se répand dans toutes les grandes villes.
Paris a connu son premier flashmob le 28 août dernier sous la pyramide du Louvre, ce qui a enclenché un débat très animé dans le cercle des blogueurs. Jean-Luc Raymond a largement relayé les informations avant et après l’évènement sur mediaTIC, et Christophe Ducamp, avec l’équipe des CraoWikistes, présente une page de liens très complète permettant de suivre les compte-rendus et les débats.
Je n’y étais pas, et quoique j’en dise, je regrette un peu d’avoir manqué l’expérience. Cependant, il est également certain que si j’y avais été je l’aurais tout autant regretté ; oui, comme Laurent, je me serais sentie piégée par le caractère moutonnant et déjà réifié de l’évènement. Moutonnant par ce que les organisateurs étant obscurs et anonymes, les participants sont assignés à une position de croyance et d’obéissance aveugle. Réifié, parce que le lieu choisi était un espace public surmonté d’une mezzanine qui favorise l’effet de spectacle que les médias, dûment prévenus, ont pu apprécier comme une belle chorégraphie depuis leur observatoire.
Quoi ! Etre venu, et s’apercevoir qu’en définitive on a été le bouffon de service pour qu’une poignée de journalistes, du haut de leur tribune, puissent remplir leurs bobines et leurs colonnes ? Je comprends la déception de nombre de participants. Ce rassemblement qui devait être le lieu de connivence et de reconnaissance mutuelle d’une myriade de solitaires anonymes, habituellement rivés à leurs écrans, soudés à leurs portables, est devenu, du fait de ce regard extérieur qui les surplombe, le lieu d’une reconnaissance publique qui les réduit à un corps collectif, une masse compacte qui réagit à l’unisson, obéit au doigt et à l’oeil. Il y a de quoi frémir.
Et les doutes rapportées par Chryde sur les organisateurs occultes de ce flashmob ne sont pas pour nous rassurer...
Fait significatif, le site organisateur qui publie les photos "officielles" de l’évènement, ne présente que des vues en plongée, prises depuis la position dominante et distanciée de la mezzanine. Elles donnenent l’image d’une chorégraphie parfaitement ordonnée, des images qui vous donnent froid dans le dos, car elles vous disent : regardez comme ils sont dociles quand on leur donne l’illusion d’agir et de s’organiser de leur plein gré, regardez comme on sait bien manipuler une bande de geeks cramponnés à leur liberté individuelle et à leur cher anonymat. Regardez, on dirait qu’ils ont été hypnotisés ou endormis par un gaz soporifique.
A l’inverse, les moblogs photo ou les albums d’images mis en ligne par les participants nous montrent des vues prises de l’intérieur. Ce sont des images parfois bougées, parfois de travers, des images de proximité bien vivantes qui nous montrent des croisements ou des glissements de regards, des corps en désordre, des têtes qu’on croit parfois reconnaître, d’autres qu’on aimerait connaître. Ce sont des tête à tête ou des vues prises à ras du sol, vision d’un agonisant sur ses semblables écroulés sur le marbre. Ce sont des points de vue subjectifs pris à égalité de position avec les autres participants. Vu de l’intérieur, c’est tout à fait autre chose
Certains blogueurs ont dit que les flashmobs sont trop futiles et manquent d’enjeu (politique s’entend). Ce n’est pas si sûr, mais ça vaudrait le coup d’en discuter. Certains ont dit que tant qu’à faire d’être purement gratuits et ludiques, les flashmobs devraient être revendiqués comme de l’art. Il me semble qu’implicitement, c’est déjà le cas puisque cela finit au Louvre. Mais si par là ils entendent qu’il faut encore renforcer l’effet de spectacle, je dis non, par pitié, n’en rajoutez pas. D’autres ont exprimé leur déception d’avoir eu a se disperser aussi vite (discipline du flashmob oblige, n’est-ce pas ?) sans avoir pris le temps de faire connaissance, de partager ne serait-ce qu’une bière avec des êtres qu’ils croisent et lisent sans doute quotidiennenment dans leur monde de tous les jours, c’est à dire le monde virtuel.
Chers flashmobeurs, internautes, blogueurs, et moblogueurs, la prochaine fois que vous aurez envie de vous réunir, organisez plutôt une petite mousse comme vous savez si bien les faire, et donnez nous des belles photo comme ça, comme ça ou comme ça. Des photos qui donnent soif, soif de vous connaître, et qui donnent envie de tendre la main pour trinquer un coup avec vous.
Je ne crois pas que les photos que vous linké n’ont rien d’officiel... je vois sur le site Parismobs une section photos qui reprend tout type de photos...
Par ailleurs la présence de journalistes était inévitable... la sauce étant montée tout l’été il n’était vraiment pas nécessaire de les convoquer pour qu’il y en ait partout...
Oui, j’ai bien mis "officiel" entre guillemets pour dire que même si ça ne l’est pas, c’est tout comme. Il se trouve que c’est justement cet ensemble de photos que le site organisateur a mis à la Une. C’est donc cette interprétation de l’évènement qu’ils ont privilégié. Certes, le site pointe aussi sur d’autres albums photos, mais de façon annexe et moins complète que ne le fait la page de CraoWiki (qui je le reconnais, est également linké par le site organisateur).
Les images font sens, et la mise en page aussi. On ne peut pas l’ignorer.
La Mousse a bel et bien eu lieu mais en tres petit comité (il était déjà un petit peu tard ;-) la prochaine fois, on fera mieux pour organiser l’apres flash mob ; c’est sur !
j’apprecie votre analyse qui fait bien la difference entre les participants (qui ont apprecie) et donc etaient dans l’action, les "voyeurs" (journalistes et sans doute organisateurs, curieux et rares passants !) et ceux qui n’y etaient pas (et sont generalement tres critiques par rapport au phenoneme - voir au flash mob - qu’ils n’ont pas vecu l’interieur).
Bien heureuse d’apprendre que vous avez trouvé matière à faire une mousse. C’est qu’il y avait bien un peu de liquide en dessous pour la faire monter ;-)
Oui, je suis intriguée par ces flashmobs qui, comme la mousse, ne semblent avoir d’autre vertu que de brasser du vent. C’est très intéressant la mousse. Le liquide qui était le contenu du verre se scinde en une multitude de petites bulles, devient elle même formes creuses, déborde et s’échappe du verre.
Voilà qui nous ouvre des horizons de réflexion sur différentes formes d’extériorité. Celle qui assimile l’ensemble des bulles à la matière continue qui reste en dépôt au fond du verre, et celle qui considère les bulles comme autant de petites extériorités juxtaposées, fragiles miroirs déformants ouverts à 360° sur le monde. Et tous ces blogs, les encadrés des
commentaires et des forums apparaissent comme autant de bulles (phylactères) dans lesquels viennent se loger des paroles et des points de vues singuliers.
Mais il y a bien d’autres questions à se poser. Pourquoi ça mousse ? Quel est le ferment qui fait entrer cette matière humaine en ébullition ? Et là, je reviendrai sur la question de l’anonymat des organisateurs qui à mon avis est très contestable ; outre que cet anonymat amène les gens à s’embarquer dans une attitude d’obéissance aveugle, il devient aussi l’objet d’un questionnement trop obsédant (Qui sont-ils ?) qui focalise l’attention sur un agent central au détriment de la multitude de personnes qui participent à l’action. Du coup, cette question fait écran à l’émergence de bien d’autres questions intéressantes. Parce qu’on s’en doute, il ne suffit pas qu’un zozo décide d’organiser un flashmob pour que la sauce prenne. Il ne suffit pas de bénéficier du dispositif d’un réseau virtuel et d’un bon taux de pénétration dans ce réseau pour faire entrer toute une communauté de gens en effervescence. Par contre, il est indispensable que cette initiative arrive à point nommé pour donner forme à un désir latent qui mijote chez tous sous une forme encore confuse.
J’ai bien quelques hypothèses à avancer, mais ce post commence à être un peu long, et peut-être que d’autres personnes ont des suggestions à faire.
A suivre donc...
C’est amusant de constater que ceux qui y étaient ont adoré et que les frustrés qui l’ont raté préfèrent tout savoir mieux que tout le monde et cracher dans la soupe avec -parfois- mauvaise foi. Exemple : il n’y a aucune photo "officielle" de l’événement. Le site de Parismobs se contente de linker le site d’un participant, comme il en linke d’autres d’ailleurs.
Dire que l’on aurait aimé participer à l’évènement, ce n’est pas cracher dans la soupe. Apprécier les photographies publiées par ceux qui ont véritablement participé au flashmob ce n’est pas cracher dans la soupe non plus. Etre frustré ? Mais oui, ça arrive tous les jours, à tout le monde et à propos de n’importe quoi. Encore heureux ! Que ferions nous sans le désir, et les frustrations qui l’accompagnent fatalement ?
Il est difficile de dire de la majestueuse photo qui est en page d’accueil de Parismob, et de la suite de photos du même auteur auxquels on accède d’un clic sur l’image, qu’elles sont l’oeuvre d’un "participant" du flashmob. Quoi qu’il en soit de leur qualité technique (fort bonne au demeurant) elles sont tout au plus l’oeuvre d’un spectateur qui a assisté à l’évènement et qui s’est tenu bien à distance de la foule. C’est un point de vue que je respecte aussi, mais qu’il s’agit de contrebalancer par les points de vues plus intimes, mouvants et subjectifs des autres participants. L’un porte un regard global (certains diraient dominateur) sur l’action, d’autres un regard partiel mais plus impliqué.
Par ailleurs, si vous lisez les compte-rendus de ceux qui ont vraiment participé, vous pourrez vous rendre compte qu’ils n’ont pas pour autant laissé leur esprit critique au vestiaire. On peut apprécier certains aspects d’une expérience, sans verser dans le béni oui oui inconditionnel.
On oublie pas que la même chose est en train de s’organiser sur LILLE.
Inscrivez vous les gens du Nord :))
oui quelle belle initiative lille !!! ms RENNES est aussi en préparation pr en savoir plus fmr.suidzer0.org vive les bretons mobbers !!!!!!!!!!!
c’était aujourd’hui...
trop terrible, je me demande combien on était ?
en tout cas, j’ai adoré ! on remet ça quand ?
Merci pour la nouvelle. D’après ce que j’ai compris il y avait entre 50 en 100 personnes à Rennes. Selon les premières impressions et témoignages, rapportés sur le forum de FlashMobRennes, les mobbers semblent enthousiastes.
Malgré les signes d’essoufflement annoncés ou perçus ces derniers temps, le calendrier des flash mobs semble bien rempli en ce moment, puisqu’aujourd’hui aussi, a eu lieu le premier flash mob à Marseille, avec quelques dizaines de persones qui cherchaient "Médor".
Karen nous signale également une version plus "intéressée" de flash mob, prévue sur Paris XIIIème dans la semaine à venir, pour protester contre la fermeture d’un cinéma.
dur de dire combien on était.. En tout cas, on avait imprimé un peu plus de 200 scenarios et il nous en reste 75 dc on devait etre une centaine je pense (en comptant que certains ont pu ne pas aimer le scenario et donc ne pas pzrticiper une fois qu’ils ss’étaient déplacés)
Personnellement et comme je l’ai déjà dit sur http://fmr.suidzer0.org/CoolForum, le moment que j’ai préferé c’est vraiment le début quand les cris sont venus de tous les cotés de la place et ont fusionné au centre !
On dit que ça s’essoufle mais tous les gens qui y ont participé ont hate de recommencer et ont apparement déjà otivés des gens !!! La prochaine devrait donc etre encore plus impressionante !