Après la réunion préparatoire d’hier soir au CERSA, je m’apprêtais à publier un court billet pour annoncer le lancement officiel des contrats de licence Creative Commons France qui s’inscrit dans le vaste chantier des International Commons. Mélanie Dulong de Rosnay qui travaille depuis plus d’un an à l’adaptation française de ces licences, a bien du mérite de s’être consacrée à une tâche aussi délicate.
Le lancement aura lieu ce Vendredi 19 novembre, à l’Assemblée Nationale pour la partie studieuse du programme, et à la Maison des Métallos pour la partie festive. Vous trouverez le programme détaillé de la journée à cette page.
Merci à Mélanie de nous avoir invités à venir présenter la Licence Art Libre lors de cette journée.
Il est indéniable que le mouvement CC qui bénéficie d’une très bonne médiatisation amène les internautes à s’intéresser au droit d’auteur et les pousse à entrevoir d’autres issues que le fatalisme binaire du piratage ou de la soumission aux impératifs du marché. Il s’agit d’une sensibilisation d’envergure au libre et au copyleft, et c’est là un apport très appréciable.
Sur le front du libre, le bruit s’amplifie, et dès demain vous pourrez entendre sur arte-radio en ligne, un brouhaha d’interviews mixées, coupées, samplées, brouillées, où les notions d’accès ouvert, copyleft, libre, bien commun, domaine public..., s’entrelaceront dans la plus joyeuse confusion.
Il faudra attendre le retour au calme pour démêler cet écheveau par un examen studieux des textes et des usages.
Notre réunion d’hier soir était un semblable brouhaha où les considérations pratiques sur les tours de parole et le minutage des tables rondes se mêlaient à des amorces de discussion de fond sur la création, l’altérité, l’intégrité, le bien commun, etc. Mais il s’est produit un tout petit incident, à peine digne d’être mentionné, qui m’entraîne aujourd’hui vers une digression impertinente et sans doute hors sujet : une fois que tous les participants retardataires furent là, nous avons momentanément interrompu les débats pour un tour de table de présentations : chacun évoquait en quelques mots son domaine d’exercice professionnel et sa forme d’implication dans le "Libre". Arrive alors le tour d’une dame quelque peu embarrassée qui nous dit être réalisatrice de petits films de court métrage, enfin plutôt ex-réalisatrice, car en ce moment dit-elle, "je m’occupe de ma vieille mère qui a 90 ans et qui..." -
Bon, bon, nous n’allons pas raconter notre vie, se fit elle interrompre.
Quoi de plus normal me diriez vous ; nous étions là pour discuter une gamme de licences qui permettent de choisir à volonté, selon des découpages finement définis, dans quelle mesure, à quelles conditions et jusqu’à quelle extension, le droit patrimonial sur une création de l’esprit peut être cédé. Nous étions là pour parler de bien commun et non de ces maux terriblement communs que sont la souffrance, la maladie, la vieillesse, la mort. Ni de ces autres biens que sont la compassion et le devoir d’entraide qui ne feront jamais l’objet de licences car personne, Chère Madame, ne viendra vous disputer ce bien humain qui vous oblige à abandonner momentanément la création pour accompagner votre mère dans une période si douloureuse.