L’occasion est offerte par Isabelle Lartault qui organise une Lecture de ses textes, 26 séquences, 1 scène, 10 occasions, le 5 février 2003 à 20h, chez J. Schmitt et Ch. Cuzin, à Paris.
Une cinquantaine de personnes du cercle de connaissances de l’auteur sont rassemblées dans un atelier d’artiste. Plafond très loin, béton parfois peint, reste l’évier dans un coin, le porte-partitions au centre, puis contre le mur, en rang, des bancs avec des chaises devant, et des matelas enfin, oui des vieux matelas, tra deri dera.
Et une sculpture, une, par Julien Mijangos : d’un coin à l’autre, puis se croisant quelque part, deux gros élastiques noirs, tendus jusque tout là haut là haut, hissé ho.
De moi, rien à tirer ce soir. Après le boulot je suis chaos. Juste bonne pour écouter Joelle Péhaut et Patrick Querillacq qui interprètent les séquences d’Isabelle Lartault. C’est fin, c’est beau, ho la hi la ho.
Entracte et cacahuètes. On taille la bavette, on se dégourdit les gambettes. Une dernière tournée de vin dans les gobelets de plastique, et c’est parti pour la musique !
Isabelle distribue des mirlitons, une dame lit Les Grandes Occasions [1]. Puis un monsieur, puis quelqu’un d’autre, et encore un autre. Le texte se répète, mais avec des variations. Les voix se couvrent, se bousculent, se cèdent le terrain. Ma parole, ils sont tous complices et copains ! Les mirlitons tirent la langue, pètent et sonnent (c’est ça, ils font pouète pouète). Il y en a qui rient, qui crient ou psalmodient, il y en a qui soufflent, plus ou moins habiles, moi je siffle c’est plus facile. Quel cirque ! Cela pourrait durer jusqu’à perpète. Isabelle bat des ailes pour qu’on s’arrête, elle remue des lèvres mais on n’entend rien, tagada tsoin tsoin.
On se calme, on s’essouffle, quand les timides enfin s’éveillent. Ils ne vont pas en rester là, alors tout le monde remet ça, dar la dir la da da.
Puisque je ne connais pas son nom, nous l’appellerons Monsieur Mirliton. C’est un homme grand aux cheveux blancs, il s’amuse comme un enfant. De son sifflet, il a déchiré le papier de couleur pour s’exercer toute la soirée avec ardeur. Du souffle et des doigts il apprend à moduler le son, il pétille, il jubile, c’est un sacré luron. Pour sûr, il n’a pas perdu son temps, il a apprivoisé l’instrument. Au moment des adieux, quand les uns se font la bise et les autres enfilent leur veste, il nous joue l’air d’Il était une fois dans l’ouest.
Bravo Monsieur Mirliton ! Titontaine et titonton.
[1] Isabelle LARTAULT, Les Grandes Occasions, 1980-2000, Les Archives modernes, 2000
Au lieu de lire ma prose de mirliton, le lecteur ferait bien d’aller de temps en temps aux nouvelles, pour voir ce qui se passe sur le brand-new blog d’Isabelle Lartault.
Il y apprendra que le Dimanche 23 mars à 22h 15, dans le cadre des Ateliers radiophoniques de France Culture, Isabelle Lartault se livrera à un essai radiophonique autour de « De Bonne Année 2007 à Bonne Année 2008 » qui est la dernière réactualisation du livre Les Grandes Occasions (1980-2000).
Et puis le 2 avril (le jour de la sirène), il y aura encore une soirée lecture chez Justine Schmitt & Zoé, autour d’un ensemble de textes rassemblés sous le titre Des mesures et démesures (Combinaison 7). Est-ce qu’on va y faire danser des toupies ?
Je repense à la soirée mirliton d’Isabelle Lartault où tant de personnes lisaient son livre en canon tandis que d’autres soufflaient dans des mirlitons.
Aujourd’hui, Reuters annonce que pour le 400e anniversaire du Don Quichotte de Cervantes dont le premier volume avait été publié en 1605, des centaines d’Espagnols ont participé à une lecture marathon de l’ouvrage, en se relayant pendant 48 heures devant un lutrin. Même le président José Luis Rodriguez Zapatero en a lu quelques lignes.
Cela se passe au Circulo de Bellas Artes de Madrid, et la lecture devrait se terminer aujourd’hui.
C’est qu’il en faut des voix, du souffle et du vent pour faire tourner le moulin de la littérature !