Thingsmagazine signale, à travers le commentaire fort intéressant qu’en donne Ross Gittins, une étude du Professeur Thomas Gilovich du département de psychologie du Cornell University et du Dr Leaf Van Boven de l’Université du Colorado, sur les satisfactions comparées de la consommation d’activités et de la consommation de biens tangibles.
Cette étude, parue dans le Journal of Personality and Social Psychology de Décembre 2003, a été menée auprès de 12000 américains auxquels on a demandé de comparer deux types d’achats faits dans "le but d’augmenter leur bonheur" ; l’un devait concerner l’acquisition d’un bien matériel, l’autre une activité ou expérience. La majorité a déclaré que l’investissement dans une activité leur avait apporté plus de satisfaction.
Selon le résumé qu’en donne Leaf Van Boven, les auteurs y voient trois raisons principales :
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l’expérience s’offre mieux à des réinterprétations positives (les détails désagréables pouvant être par la suite ignorés ou même valorisés) et tend à être considérée comme un enrichissement de la personnalité, alors que l’objet reste en dehors de la personne ; il n’est pas subjectivé et intégré au même titre qu’une expérience.
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Une expérience est souvent partagée avec d’autres personnes, et devient l’occasion de nouer des liens sociaux.
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Raconter une expérience est assurément plus intéressant et amusant que parler d’une acquisition matérielle.
Cette étude reste cependant cantonnée à la comparaison entre deux modes de consommation. Je serais curieuse de savoir quelles conclusions on pourrait tirer d’une comparaison entre une expérience que l’on s’est trouvée ou inventée gracieusement, et celle d’un loisir préformaté et encadré à grands frais.
Ross Gittins signale également une étude du Professeur Martin Seligman, Authentic Hapiness sur les plaisirs faciles obtenus par une dépense passive, et la nécessité qu’il y a, même pour un lézard, à accomplir un travail (de sublimation ?) pour trouver du plaisir à vivre sans sombrer dans la neurasthénie.
Mais s’il fallait choisir parmi tous les livres qui vendent des recettes de bonheur, je crois que je préfèrerais encore celui Paul Watzlawick, Faites vous-même votre malheur. Rarement rire aura été aussi salutaire.
A signaler, un billet instructif de Delphine Baillergeau sur le concept de satisfaction, qui nous explique ce qu’est le "paradigme de la disconfirmation" ; un critère introduit par R.L Olivier pour mesurer l’écart entre l’attente de satisfaction que l’on nourrit avant une acquisition spécifique, et le jugement porté sur la performance du produit ou service après son acquisition. Selon cette théorie c’est "la disconfirmation [qui] va générer l’évaluation globale de l’expérience de consommation, c’est à dire la satisfaction".
Voilà un critère qui devrait entrer en ligne de compte dans l’étude de Gilovich et Van Boven, évoquée ci-dessus.
Pourrai-je en déduire que les expériences surprises, les situations qui nous arrivent sans qu’on les ait recherchées, celles vis à vis desquelles nous improvisons sans avoir nourri une quelconque attente (et sans forcément consommer !), sont susceptibles d’apporter un meilleur taux de disconfirmation ?