Voici que « Le droit aux images dans l’environnement électronique » devient l’occasion de donner une autre traduction à l’intuition de Malevitch lorsqu’en 1913, il réalisait les décors de Victoire sur le soleil de Matiouchine. Car c’est bien l’idée d’une « représentation de l’absence d’image » qui fut à l’origine de sa peinture non objective et du Carré noir qu’il qualifiera plus tard d’« icône royale ». Ici, on brûle les étapes pour aller directement au Carré blanc..., mais ce n’est pas précisément une victoire.
Ironie mise à part, je tiens à remercier André Gunthert et les co-auteurs qui ont rédigé cet article. Ils nous permettent de mieux comprendre les usages et l’état du droit en matière de reproduction des oeuvres visuelles appartenant au domaine public. Au moment où les esprits s’échauffent sur une polémique trop brouillonne qui amalgame des problèmes de différents niveaux (je pense au projet du Louvre d’Abu Dhabi), au moment aussi, où les recommandations du rapport Lévy-Jouyet suscitent des inquiétudes, cet article a le mérite de resserrer le propos sur un aspect précis des problèmes liés à la gestion du patrimoine artistique.
Il est bien entendu qu’il faut faire la part entre la nécessaire conservation matérielle des oeuvres visuelles et de leur représentation qui ont évidemment un coût, et d’autre part, la tradition, au sens de l’acte de transmission qui implique la reproduction des oeuvres. Le plus grand conservatoire de la culture n’est-il pas la mémoire vive de ceux qui en perpétuent le goût ? Il me semble que dans l’environnement électronique où tout un chacun veut partager son enthousiasme pour ce qu’il a eu le bonheur d’apprécier, cette question excède le cercle des spécialistes qui selon leurs fonctions ou leur position dans les institutions, se verront réserver des droits de reproduction qui seront par ailleurs concédés aux uns ou refusés à d’autres. Aujourd’hui, tout le monde est médiateur, si ce n’est créateur. C’est pourquoi, les raisonnements qui appliquent à l’économie de la culture une logique de type industrielle avec une bipartition producteur/consommateur, sont de moins en moins pertinents car ils s’ingénient à nier la réalité vivante et agissante de ce qu’on range sous l’étiquette trop générique de "public".