Elle est affichée partout. Sur toutes les cabanes des marchands de journaux. Captivante de loin, déroutante de près. Posant nue de trois quarts, cette jeune femme m’apparaît comme une création assistée par ordinateur. Une descendante de Lara Croft branchée cosmétiques et régimes amincissants. Quelque peu dérouté, mon regard glisse sur une accroche des plus rassurantes - " remodeler son corps " - venant ainsi justifier l’existence de cette beauté digitale...
Quelques jours plus tard, en feuilletant le magazine, je me rends compte que cette créature photoshopée existe vraiment.
Je suis allée hier chez le marchand de journaux de mon quartier dans l’espoir de voir de plus près à quoi pouvait ressembler cette Barbie préraphaélite. Je me disais que les pages intérieures nous feraient peut-être grâce du sfumato numérique qui éloigne l’évanescente adolescente loin derrière le cruel équarrissage de la typographie rose bonbon.
Hélas ! le numéro en question était retiré des rayons. A sa place, un nouveau numéro de Votre beauté, que j’ai zieuté en soulevant d’autres magazines pour entrevoir une autre beauté, acérée, sportive et hygiénique. Un gros titre rose bonbon me saute à la figure : « ANTI FLASQUE ! ». Terrifiée, j’ai vite refermé la pile de magazines et je suis partie en oubliant d’acheter le télé Z.
Si vous étiez un peu plus branchée photo, vous auriez remarqué qu’il n’y a aucune retouche numérique sur cette image et que seul l’éclairage du photographe a créé cet univers. La mannequin Carole n’est pas une barbie préraphaélite mais une jolie fille bien dans son corps et dans sa tête. Elle réalise beaucoup de campagnes cosmétiques et avec nous la prochaine photo pour Elancyl.... qui ne sera pas retouchée.... avant d’écrire de beaux mots merci de vérifier vos connaissances photo et cela vous aménerait à respecter un peu plus les mannequins ...
Eliane Fabbris
Oh ! toutes nos excuses pour avoir réduit l’art de Bruno Fabbris, Pygmalion des éclairages et créateur d’auras, à un vulgaire maquillage numérique. Nous sommes confondus par la beauté, tant elle paraît irréelle ! Quand la réalité se plie au modèle de l’idéale beauté, il y a de quoi s’y perdre ; entre l’auréole du saint et l’aréole du sein, on ne sait plus auquel se vouer.
Bien des femmes, et j’en suis, seraient flattées d’êtres assimilées à une Barbie préraphaélite. Où est l’offense ? Qui, petite fille, n’a rêvé d’être belle comme une Barbie ? Notre désir est façonné par cette parfaite norme. Si de surcroît, il nous était donné d’ajouter la spiritualité à la perfection plastique en s’alliant la grâce des beautés préraphaélites, alors quel bonheur !
Que la mannequin s’appelle Carole, évoque une autre doll ou idole de mon enfance. Son image ravissait déjà mes sens, voilà que son nom m’enchante l’esprit.
La figure dont l’idole est le modèle,
Que serait-elle si on la parait ? [1]
L’ironie du ton, pour ma part en tout cas, ne s’adresse ni au modèle, ni même au photographe, mais bien à la violence de l’injonction qui nous est faite, à travers le titre miroirique de la revue : "Votre beauté". Comment ne pas y voir une image imposée de soi, une obligation à "remodeler son corps" de gré ou de force, pour qu’il se conforme à ce charmant modèle ?
Je chéris la beauté sous toutes ses formes. Elle me ravit et me délivre. Mais vouloir à tout prix l’incarner ou la posséder, c’est choisir seulement entre Narcisse ou Midas.
[1] ONSORI, poète persan, 10-11ème siècle
Sans doute eut-ce été plus doux de croire que les beautés idéales sont des êtres de synthèse.
Dans son article sur la couverture du magasine "Votre beauté", Nicolas Thély évoquait Lara Croft. Cette semaine, l’héroïne de "Tomb Raider" s’étale sur une double page dans le Nouvel Observateur du 15 janvier, pour introduire un excellent dossier de Anne Fohr et Isabelle Monnin : La tyrannie du corps idéal.
"Quand 86% des femmes se déclarent insatisfaites de leur anatomie, il ne s’agit plus de souffrir pour être belle, mais de se torturer pour acquérir une silhouette chimérique"
"Celui ou celle qui ne joue pas le jeu est menacé, outre ses propres complexes, de stigmatisation. Puisque, entre les diktats esthétiques et les recommandations médicales, est apparu le devoir de beauté comme un des nombreux devoirs du citoyen moderne."
Images et chiffres à l’appui, leur article passe en revue les vicissitudes des régimes, la tyrannie des salles de gym surpeuplées, la douleur des interventions chirurgicales, sans oublier les sacrifices économiques auxquels il nous faut consentir pour goûter aux délices de telles astreintes.
Le dossier se conclut sur un entretien avec le psychiatre et psychanalyste Samuel Lepastier, un entretien que je serais bien tentée de reproduire dans son intégralité si je ne craignais d’enfreindre les limites du droit de citation. En voici quelques extraits :
"[Le corps idéal] est un corps à la fois voluptueux et anorexique. Aucune femme ne peut répondre aux exigences de ce modèle...C’est un corps anatomique , mais pas un corps du désir."
"[Le grand ordonnateur de ce corps introuvable, c’est] Les misogynes, les vieilles, tous ceux qui n’aiment pas les femmes. Tous les intégrismes s’attaquent au corps des femmes, porteur de vie et source d’angoisse. Façonner des canons impossibles à atteindre est une nouvelle manière de culpabiliser les femmes. Chaque fois que ces dernières obtiennent des avancées décisives, des interdits réapparaissent de façon détournée. Le corps de rêve contemporain ne peut être obtenu sans recours à la chirurgie, à un régime draconien et au body-building : c’est la nouvelle façon de voiler le corps érotique et le plaisir qu’il peut procurer"
"Une effigie n’est pas un corps... Le corps véritable est mis à l’écart, et cela a toutes sortes de conséquences, comme d’empêcher la pensée, qui naît toujours des perceptions corporelles. [Un exemple ?] La canicule de l’été. Si nous avions été capables de sentir, de nous fier à nos réactions corporelles, à notre malaise physique, nous aurions été en alerte beaucoup plus tôt. Les veilleurs de garde n’auraient pas attendu des informations sur des écrans d’ordinateur pour sonner le tocsin. Notre psychisme n’intègre plus nos sensations corporelles. J’étais interne dans un service de gérontologie pendant la canicule estivale de 1976 : nous n’avons eu aucun décès parce que tous les membres de l’équipe soignante, souffrant de la chaleur, ont immédiatement perçu, par empathie, les besoins des malades. Notre société n’arrive plus à penser avec son corps."
Hasard ou effet de maturation rédactionelle ?
Cet intéressant dossier paraît peu après la sortie d’un numéro spécial du Nouvel Observateur consacré aux "Nouveaux seniors 2003-2004". Les images nous montrent les "seniors" sous un jour des plus rassurants : ils sont souriants, et paraissent rarement avoir plus de quarante-cinq ans. Les têtes vraiment ridées et blanches ne sont photographiées que de dos, de très loin, ou en plongée. La génération montante des seniors, on en parle, mais c’est encore avec des pincettes. Les dossiers "psycho", "famille", et "loisirs" sont encourageants et consolateurs, ils nous donneraient presque envie de vieillir. Mais bien entendu, les dossiers "beauté", "forme", et "sexualité" qui viennent à la suite ne nous épargnent aucun des barbarismes susmentionnés pour "arrêter le temps" : sport, thalassothérapie, chirurgie, crèmes et masques, injections de collagène, Botox, traitements hormonaux, Viagra ; la panoplie est complète.
La publicité de la quatrième de couverture est pour des chaussons élégants.
Via Jean-Luc Reymond sur mediatic :
Beauty Worlds : Global Beauty News pointe vers des articles en anglais du monde entier relatifs à la beauté... Et tout d’un coup, on apprend à relativiser beaucoup sur l’idée d’une beauté générique tant répandue. Comme quoi, un blog peut aussi servir à avoir un esprit critique !
Il est certain que l’on peut apprécier la richesse des ressources collectées par ce site, comme les remarques avisées qui les accompagnent parfois. Les liens pointent autant sur des articles critiques concernant les standards de la beauté (par exemple ce lien sur l’esthétique Barbie) que sur des articles de promotion pour de nouveaux soins de beauté (par exemple cet article sur l’esthétiques par l’acupunture) ou encore des articles politiques sur la difficile question du foulard islamique.
Mais comment faire pour ignorer le bandeau publicitaire qui clignote sur la droite ?
Non, non ! Je ne veux pas "plumper" mes lèvres avec du collagène ! Quoi qu’en dise la pub, des vraies femmes "branchées cosmétique et remodelage de soi" m’ont assurée que ça fait très mal, qu’on est défigurée pendant au moins trois jours, et qu’il faut recommencer tous les mois. Pour avoir des "extremely kissable lips" il faut donc se passer de baisers pendant 4 ou 5 jours par mois. Ajoutez cela aux périodes d’indisposition (parce qu’il ne faut pas rêver, le praticien ne sera jamais en mesure de vous donner rendez-vous pile au moment de vos règles), vous imaginez le sevrage !
Cette photo et magnifique, tout comme le model qui franchemet, me laisse tout fondant. J’adore aussi la nouvelle coverture de ce mois-ci du même magazine
Je suis d’accord, cette photo est vraiment superbe, et je suis d’accord avec vous, la couverture de ce mois ci est également à tomber par terre, seul hic : comment ces jeunes et superbes mannequins vont elles percer si on ne connais pas du tout leur noms ?
La demoiselle qui fait la couverture de l’édition de février me semble être Heidi Klum... Elle n’a pas a se soucier de percer, c’est déjà fait depuis des années grâce à sa sublime plastique et aux magnifiques produits et marketing de Victoria Secrets.
Pour participer un peu aux posts précédents traitant de l’image donnée, ou plutôt de l’image que l’on veut donner, à ces femmes je me contenterai de dire qu’elles sont belles et c’est tout.
Je ne restreint pas leur existence à leur beauté, mais c’est la seule chose d’elles qu’il nous est donné de connaître et pour celà elles méritent d’être aussi admirées que toute autre personne réussissant dans un autre domaine.
Si dans la rue je couve du regard leurs affiches, j’ai cessé de le faire avec le malsain regard du pré-ado... Elles sont belles, c’est tout et c’est TOUT. Elles ont cette chance de pouvoir faire plaisir aux sens rien qu’en entrant dans une pièce et pour celà on ne les remerciera jamais assez.
Ce n’est pas Heidi Klum.
Ou peut on trouver cette photo ?
Même question ? Où peut-on la trouver ? J’hésite à faire le planton à côté du marchand de journaux pour récupérer le poster (il fait passablement froid à Paris)
Es-tu sûr que ce n’est pas Heidi Klum ? je n’ai vu la photo que de loin et en passant en moto, mais elle a vraiment le même visage...
Allez, si qqn a le journal, qu’il envoie une copie scannée.
J ai bien un lien a vous envoyer mais l image est petite
http://www.journaux.fr/revue.asp?revue=L3990
et aussi...
http://www.journaux.fr/revue.asp?revue=M1987
Bon je vois que mon lien ne marche pas.
Faut aller sur www.journaux.fr
et taper "votre beauté" dans la case recherche
Je crains malheureseument que vous ne cherchiez la satyre là où il n’y a que l’adoration . Relisez les textes précédents et vous verrez que personne n’a cherché à être blessant mais que que tous ont admiré en cette femme sa grande beauté . Comme aucun des êtres anonymes que nous sommes ne la connait ( sauf vous apparement et je vous en félicite ) , personne n’a la prétention de la juger sur d’autres critères que son physique , est-ce là un acte inhumain ?
Bonjour,
Connaissez-vous la jeune fille posant en couverture de Votre beauté de Mars 2006 ?
Vous semblez connaitre ce milieu tres en profondeur ! Mon but est de recuperer des images numeriques de cette jolie fille mais sans les titres incrustés de la couverture.
Pouvez-vous m’aider, s’il vous plait ?
Furax le 18-02-06
Ce magazine n’est vraiment destiné qu’aux pervers qui aiment loucher et baver sur le physique de jeunes filles sur des pages de magazines populaires car ils auraient trop honte de se montrer dans des sex-shop, là où ils ont leur place. Vous me dégoûtez tous, ce magazine me dégoûte et n’espérez pas que les femmes se sentent mieux dans leur corps et que les violeurs s’arrêtent pour de bon.
damn you’re a helluva perv to be asking where to get digital photos of the cover of a magazine. why didn’t you just buy the magazine so you can masturbate to it, or do you prefer jacking off to your computer screen ? Or were you just too chicken to buy a women’s magazine because you know that the newsstand man would know what you were going to do with the magazine ?